Au Nord du Cameroun, un administrateur de santé prépare sa retraite grâce à l’agriculture
A 45 ans, Moustafa Eli élève des taurins et pratique la culture du mil et du maïs.
Moustafa Eli pense déjà à sa retraite. A 45 ans, cet administrateur de santé a opté pour le secteur agricole. En 2008, il s’est lancé dans l’élevage des taurins, une espèce dite « initiée », spécifique au peuple Dowayo, dans la localité de Poli, région du Nord Cameroun. En 2016, il a complété sa future reconversion en investissant dans l’agriculture.
A Touptè, un bourg situé à quelques kilomètres de Poli, ses plants de mil et de maïs s’étendent à perte de vue. En cette matinée du mois d’octobre, le jeune quadragénaire donne des instructions à ses employés qui l’aident dans les travaux champêtres : défrichage, mise en terre des semences, pulvérisation, récolte, conditionnement, transport... « Toujours faire un dernier nettoyage », « chercher la main d’œuvre » supplémentaire… Tout sourire, Moustafa, bottes aux pieds et casquette vissée sur le crâne, zigzague entre les sillons tout en appréciant les épis de maïs.
Deux millions de Francs Cfa par an
Pour la saison agricole 2023, le jeune fonctionnaire par ailleurs chef de district de santé de Djohong, dans la région voisine de l’Adamaoua, a emblavé plus de trois hectares (ha) de maïs et plus de dix quarts d’hectares de mil. Malgré la cherté des intrants (insecticides, engrais, urée, notamment), les activités de Moustafa Eli sont en constante évolution, chaque année. En 2022, il a récolté 57 sacs de 100 kg de maïs, contre 45 sacs en 2021. Pour la même période, le rendement du mil a pratiquement doublé, passant de neuf sacs de 100 kg à 16 sacs. Pour 2023, les récoltes sont en cours.
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Au moment où les prix de ces produits de grande nécessité ont augmenté, l’agriculture permet à Moustafa de générer des revenus supplémentaires. Les ventes lui rapportent environ deux millions de Francs Cfa par an.« Le sac du maïs est monté à 35 000 F Cfa. Si je vends 60 sacs, c’est beaucoup d’argent pour un jeune. Je tire mon épingle du jeu », se réjouit-t-il. Dans l’élevage aussi. Son cheptel est ainsi passé de deux têtes (un couple) en 2008 à 64 bœufs aujourd’hui (2023)
Emploi jeune
Moustafa Eli ambitionne de se lancer dans la production du lait des taurins à Poli. En attendant, il ne perd pas de vu l’importance de ces animaux dans les travaux champêtres. En effet, cette race rustique et résistante, est caractérisée par leur courte taille et une silhouette sans bosse. Ces taureaux sont utilisés comme charrues pour labourer les champs avant les semences.
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Et face à la cherté des intrants, l’agro-éleveur utilise les déchets de ses animaux comme engrais naturel pour fertiliser ses parcelles. Une réduction de dépense et une plus grande marge de bénéfice. Ce qui lui permet de soutenir sa famille, de lutter contre la pauvreté et de promouvoir l’emploi des jeunes dans sa localité, comme il le dit.
Jérôme Baïmélé