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« Protéger les forêts du Bassin du Congo, c’est aussi protéger les populations qui en dépendent »

« Protéger les forêts du Bassin du Congo, c’est aussi protéger les populations qui en dépendent »
Josiane Kouagheu
Josiane Kouagheu
  • 18-Jun-2025 10:00:00

Selon les nouvelles données du laboratoire Glad de l'Université du Maryland disponibles sur la plateforme Global Forest Watch du World Resources Institute (WRI), en 2024, 6,7 millions d'hectares de forêt tropicale primaire, soit une superficie proche de celle de la Sierra Leone, ont été détruits. 


Cette disparition, due en grande partie à de gigantesques incendies, est la plus importante de ces 20 dernières années. Concrètement, en 2024, la forêt tropicale primaire a disparu à un rythme de 18 terrains de football par minute, soit près du double des pertes de 2023, souligne le WRI.
Il s'agit de certains des écosystèmes forestiers les plus importants, essentiels pour les moyens de subsistance, le stockage du carbone, l'approvisionnement en eau, la biodiversité... 


Si cette déforestation record est majoritairement due aux incendies en Asie et en Amérique Latine, dans le Bassin du Congo, l’agriculture familiale, la production de charbon de bois et l'exploitation forestière sont à l'origine de la destruction de la forêt primaire.
Dans le deuxième poumon vert de la planète après l’Amazonie,  la République démocratique du Congo (RDC) et la République du Congo enregistrent les plus  importantes pertes tandis que des pays comme le Gabon, la Guinée Equatoriale ou encore la République Centrafricaine restent stables. 


Phanuella Djanteng, chargée de l'engagement des parties prenantes du Bassin du Congo au World Resources Institute, analyse la situation. 

 

 

Agripreneurs d’Afrique: Entre 2023 et 2024, la perte de forêts tropicales primaires a augmenté de 80 %. Les incendies massifs ont été le principal facteur de cette déforestation. Dans votre rapport, vous mentionnez qu'au cours de ces 24 dernières années, le défrichage des forêts pour des besoins agricoles a été la cause  majeure de cette destruction à travers le monde. Que s'est-il passé en 2024 ?

 

Phanuella Djanteng: plusieurs événements distincts mais interconnectés expliquent la montée spectaculaire des incendies comme principal facteur de la perte des forêts. En 2024, il y a eu une hausse de chaleur sans précédent, amplifiée par le phénomène El Niño, qui a entraîné une élévation marquée des températures. Cette chaleur accrue a provoqué un assèchement généralisé de la végétation — plantes, arbres, sous-bois — créant ainsi des conditions idéales pour l’inflammation et la propagation des feux. 

 


À cela se sont ajoutées des pratiques humaines, telles que les brûlis liés à l’agriculture itinérante et la production artisanale de charbon de bois dans certains pays. Ce cocktail de facteurs a rendu les paysages hautement inflammables, facilitant l’embrasement rapide et l’expansion des incendies.

 


Il est important de souligner que ces phénomènes s’inscrivent dans une boucle de rétroaction climatique où plus d’incendies = plus d’émissions de gaz à effet de serre = réchauffement climatique accru = assèchement des forêts primaires = encore plus d’incendies… ainsi de suite.

 


Cependant, dans le bassin du Congo, l'agriculture itinérante est restée le principal facteur de perte de forêts tropicales. Pourquoi ? 

 


Dans le Bassin du Congo, l’agriculture itinérante sur brûlis reste le principal facteur de perte de la forêt tropicale pour plusieurs raisons interconnectées, à la fois économiques, sociales et écologiques. 

 

 


C’est la forme d’agriculture la plus couramment pratiquée par les populations rurales car très peu coûteuse et transmise de génération en génération. Sa méthode repose sur le défrichement et le brûlage de la végétation pour ouvrir de nouveaux champs. 

Toutefois, elle entraîne une perte rapide de fertilité des sols, ce qui provoque une chute des rendements agricoles après seulement deux à cinq ans d’exploitation. Face à cette baisse de productivité, les agriculteurs abandonnent les anciennes parcelles pour en ouvrir de nouvelles, entraînant ainsi un cycle permanent de défrichement. 

 

En zone forestière, cela signifie que des pans entiers de forêts sont rasés pour créer de nouveaux champs. Imaginez alors des centaines, voire des milliers ou encore millions de ménages défrichant chaque année plusieurs hectares de forêt, dans chaque pays du Bassin du Congo.


Lire aussi: À l'Est du Cameroun, les forêts toujours exploitées illégalement

 

Cela représente une pression immense sur les écosystèmes forestiers. Et avec une population en croissance constante, les besoins alimentaires augmentent, intensifiant encore la pression sur les forêts. 

 

L’agriculture itinérante est à la fois une solution de survie et une menace environnementale. Tant que les communautés n’auront pas d’alternatives viables, cette pratique continuera d’être le principal moteur de déforestation dans le Bassin du Congo.

 

En République démocratique du Congo et en République du Congo par exemple, la situation est alarmante. La déforestation y est encore importante. Qu’est ce qui fait problème dans ces pays ?

 

Plusieurs facteurs directs et indirects expliquent l’ampleur de la déforestation dans les deux pays. Ces pays sont majoritairement forestiers, avec une grande partie de la population vivant dans ou à proximité des forêts, dont elle dépend étroitement pour sa survie quotidienne (alimentation, énergie, habitat, revenus). 

 


Les milieux ruraux sont souvent enclavés, ce qui limite fortement l’accès des populations à des ressources matérielles, financières, technologiques et éducatives. Faute d’alternatives, les pratiques agricoles utilisées sont traditionnelles et extensives, et contribuent fortement à la perte de couverture forestière, notamment à travers l’agriculture itinérante sur brûlis. 

 

Une vue des forêts du Bassin du Congo. Josiane Kouagheu/ Agripreneurs d'Afrique

 

 

 

À cela s’ajoute l’insécurité présente dans certaines localités, liée aux conflits armés ou à l’accaparement des terres par des groupes armés, ou encore par certaines grandes entreprises forestières ou minières. 

 

Ces situations forcent les populations à se déplacer ou à se réfugier en forêt, où elles exploitent les ressources disponibles pour assurer leur survie. Enfin, le besoin en énergie domestique, notamment en bois de chauffe et charbon de bois, reste extrêmement élevé.

Faute d’accès à des sources d’énergie alternatives, les forêts deviennent la principale source d’approvisionnement, accentuant encore leur dégradation.


Le Cameroun demeure toujours dans le top 10 des pays ayant perdu le plus de forêts primaires tropicales. Vous semblez noter une légère amélioration. De quoi s’agit-il concrètement ? 

 

En effet, le Cameroun figure toujours parmi les 10 pays ayant perdu le plus de forêts primaires tropicales en 2024. C’est pourquoi, la mention de « légère amélioration » mérite d’être interprétée avec nuance.

 

 

Les données de 2024 montrent une baisse de la perte de couverture forestière, mais cette baisse est relative au taux de perte des années précédentes. Elle ne signifie pas un renversement mais plutôt un ralentissement de la tendance des pertes. 

 

Est-ce à dire que les actions de lutte contre la déforestation au Cameroun ont été accentuées ? 

 

Plusieurs rapports ou publications font supposer que les actions de lutte contre la déforestation au Cameroun ont été accentuées. Ils font état du renforcement des politiques, normes et de l’application de la loi forestière, de l’intensification des actions contre l’exploitation illégale des forêts, de la promotion de l’agriculture et des énergies vertes, du déploiement d’initiatives communautaires de surveillance, de renforcement d’appui technique via des ONG et partenaires, etc.

 

Toutefois il ne faut pas perdre de vue que les menaces sur les forêts persistent et que la tendance de perte des forêts peut encore être inversée.


En République centrafricaine, au Gabon et en Guinée Equatoriale, la situation semble stable. Quelles actions les gouvernements de ces pays ont-ils mis en place pour parvenir à ce résultat ?   

 

La stabilité relative de la perte forestière observée ces dernières années au Gabon et en Guinée équatoriale résulte de plusieurs mesures politiques, économiques et institutionnelles mises en œuvre par les gouvernements de ces pays. 

 

Le Gabon a adopté une stratégie ambitieuse de gestion forestière durable, reposant sur : l’obligation de certification des concessions forestières (FSC ou équivalent), une politique de zéro déforestation, et la transformation locale du bois (interdiction d’exporter du bois brut). 

 

Aujourd’hui, près de 50 % du territoire gabonais est classé en aires protégées ou sous gestion durable, et le pays participe activement aux programmes REDD+ avec des résultats remarqués à l’échelle internationale.

 

 


De son côté, la Guinée équatoriale a mis l’accent sur le zonage forestier, le développement d’aires protégées et un contrôle plus strict des concessions forestières. L’exploitation forestière y est globalement maîtrisée.

 

Il convient toutefois de noter que les faibles densités de population en République centrafricaine et en Guinée équatoriale contribuent également à limiter la pression agricole sur les forêts, contrairement à d’autres pays de la sous-région. Cela explique en partie la relative stabilité des pertes forestières observée dans ces deux pays.


Que faire selon vous pour réduire la déforestation dans le Bassin du Congo ? 

 

Préserver les forêts du Bassin du Congo passe nécessairement par la prise en compte des besoins des populations locales. On ne peut espérer réduire durablement la déforestation sans répondre aux enjeux sociaux, économiques et fonciers qui affectent les communautés qui vivent au cœur de ces forêts. 

 

Pour y parvenir, il est essentiel de mettre en œuvre des mesures intégrées, inclusives et durables, combinant des actions politiques, économiques, sociales et techniques. 

 

Autrement dit, il faut transformer en profondeur les modèles économiques, énergétiques et fonciers qui sont à l’origine de la déforestation, tout en garantissant la justice sociale et les moyens de subsistance des peuples autochtones et des communautés locales. 

 

Des populations autochtones des forêts du Bassin du Congo. Josiane Kouagheu/ Agripreneurs d'Afrique

 

 

Cela passe par des actions concrètes, simples mais efficaces, telles que : l’adoption généralisée des pratiques agricoles durables comme l’agroforesterie, le développement et la diffusion des alternatives énergétiques au bois et au charbon, la sécurisation et la valorisation des droits fonciers des communautés locales et peuples autochtones, la promotion de partenariats public-privé dans les domaines de la restauration, de l’agriculture durable et de la foresterie communautaire, et la mobilisation de financements durables et équitables.

 

En somme, protéger les forêts du Bassin du Congo, c’est aussi protéger les populations qui en dépendent, en leur offrant des solutions viables, justes et durables.

 

Josiane Kouagheu 

 

 

 

 

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