A Buganga dans la province du Sud-Kivu, dans l'est de la République Démocratique du Congo (RDC), Odette Kabidu, 33 ans, se bat depuis quatre années pour sauver les vastes champs de bananiers de son village. Depuis février 2016, elle éduque et sensibilise des agriculteurs et agricultrices de sa communauté sur les techniques pour lutter contre le Wilt Bactérien qui ravage les bananeraies. Agricultrice et propriétaire de plusieurs plantations à Buganga, la jeune femme n'a pas attendu l’action du gouvernement et des organisations non gouvernementales pour réagir face à ce mal qui se manifeste par le flétrissement des feuilles de bananiers et le jaunissement précoce et désordonné de la banane.
Abandonnée par son mari en juin 2010, cette mère de deux enfants a appris à trouver elle même des solutions à ses problèmes. Avant de devenir sensibilisatrice, Odette suit une formation organisée par le gouvernement en partenariat avec des Ong internationales, sur les techniques culturales de lutte contre le Wilt Bactérien à Katana, un village voisin. «Seulement un petit nombre de gens y avaient pris part, se souvient la jeune femme en qui sa communauté avait misé. Il revenait à nous participants, de relayer les leçons apprises dans nos communautés locales».
« Les techniques consistaient entre autres à couper très rapidement les plantes déjà affectées et désinfecter avec le feu ou l'eau de Javel les outils avec lesquels on a coupé et veiller à empêcher toute divagation du bétail dans les bananeraies, détaille-t-elle. Une autre technique copiée de l'Ouganda consistait à enlever régulièrement les bourgeons mâles après deux jours». Aussitôt revenue dans sa localité, Odette crée son association dénommée « Umoja Wetu » (notre union, en Kiswahili, la langue parlée localement), pour mieux s’impliquer sur le terrain avec pour mission principale de relayer et partager les techniques avec les habitants du village. Les premiers bénéficiaires sont les 42 membres de l’association formés et qui doivent aller sensibiliser à leur tour.
«Des grandes pertes économiques »
Selon un rapport de consultance sur le Wilt bactérien daté de 2008, cette maladie apparue pour la première fois en RDC en 2001 est transmise chez le bananier par des vecteurs tels que les abeilles, les guêpes et drosophiles qui choisissent « préférentiellement » les fleurs du bourgeon mâle. Le gouvernement congolais assure que les agriculteurs de la filière banane, l’une des principales denrées alimentaires aux côtés du maïs et du manioc des provinces du Nord et du Sud Kivu ont enregistré « des grandes pertes économiques ». La production estimée à plus de 400 000 tonnes de bananes en 2009 a fortement chuté.
Mais, à Buganga, Odette Kabidu, tout comme des habitants-formateurs se disent satisfaits par les bons résultats de la lutte. « Avec la venue de cette maladie, on croyait que c'était la fin du monde. On ne pouvait plus voir une seule bananeraie sans que la moitié des plantes ne soient affectées. Mais aujourd'hui, il ne reste que très peu de traces de la maladie », se réjouit Odette Kabidu qui ne lâche pas pour autant son combat.
Sammy Mupfuni à Buganga (Sud-Kivu)