Cameroun : un passionné de la pisciculture hors sol

Âgé de 44 ans, Etienne Ngweha élève environ mille poissons silure.
Il est environ 16h, ce vendredi à Nbwang à la périphérie de Douala, capitale économique du Cameroun. Pour y arriver, il a fallu emprunter une moto. Pas besoin de trop préciser sa destination. Le carrefour est surnommé par les conducteurs de mototaxi, « carrefour Etienne » « Parce qu’il y a un éleveur de poisson qui s y trouve », sourit le conducteur qui nous y a conduit. Sur le site d’une superficie de 2000 mètres carré, nous sommes accueillis par Etienne Désiré Ngweha Lipem, le célèbre pisciculteur hors sol connu de tous ici.
Son laboratoire de reproduction de poisons est constitué de quatre bacs d’incubation, quatre aéroteurs, un groupe électrogène, une trousse à dissection. Tout un dispositif qui s’élève à près de 2 millions de francs CFA, assure Étienne. « Je me suis lancé dans la pisciculture par amour pour la science, et si je dépense de l’argent pour mettre en place un dispositif pour ma passion, c’est un grand plaisir », précise le passionné de pisciculture, âgé de 44 ans qui consacre des heures d’horloge par jour à ses poissons.
C'est dans des bassins couverts, que Etienne élève environ 1 000 poissons appelés silures de couleur sombre. L’eau dans laquelle ces poissons se baignent est renouvelée en permanence. De plus, il faut pomper de l’oxygène pour permettre aux poissons de respirer. Un travail qui demande du temps, de l’attention et des moyens financiers. «Ce type d’élevage nécessite de l’infrastructure. Il faut pomper de l’eau en permanence pour alimenter les bassins. C'est coûteux, mais ça permet de contrôler la qualité de l eau », précise le quadra qui se fait aider de ses enfants.
Processus de reproduction laborieux
Car le processus de reproduction est laborieux et prend du temps. Un mois en laboratoire « afin de mieux réussir le processus de reproduction », confie-t-il. Les étapes sont nombreuses : Etienne se rassure au préalable que tout est stérilisé et l’eau remplie selon les normes, soit « neutre, pas acide ». Passer ensuite au choix des géniteurs. « Quand le mâle papille, il est rosâtre, avec un poids d’environ un kilogramme. Chez la femelle, on appuie son abdomen pour prélever les œufs. Ils doivent être noirs ou marrons », ajoute-t-il. Le processus de reproduction se fait alors dans un laboratoire obscur à l’abri des bruits car «la lumière et les bruits influencent le taux de fécondité ».
Après la fécondation, au bout de 24 heures, les oeufs sont étalés sur une sorte de tamis appelé clairs d’incubation. Vient la phase du suivi. Il faut veiller au laboratoire : « en cas de coupure d’énergie électrique je démarre aussitôt le groupe électrogène », relate Etienne. Quelques jours après la fécondation, de petites laves se forment . On les transfère dans des bassins circulaires. Ils sont nourri à base de l’artémia. Une composition faite de petits poissons et de plantons. La croissance du poisson dure environ 6 mois. « Durant cette période, mes enfants et moi veillons à changer et à traiter l’eau dans laquelle vivent ces poissons » , souligne le pisciculteur investi dans cette activité depuis trois ans.
2700 francs Cfa le kilogramme
Et les clients ne manquent pas. « Par curiosité, je suis allée dans son laboratoire et j’ai vu des poissons frais et dodus. J’ai demandé à acheter quelques uns pour manger avec ma famille», raconte une habitante. Etienne Ngweha livre ses poissons dans les ménages et le bouche à oreille fait le reste. «Je vends le kilogramme des silures à 2700 francs Cfa », révèle-t-il.
Si les clients se bousculent, Étienne Ngweha Lipem éprouve aujourd'hui quelques difficultés dans son métier du fait du «coût de la production de plus en plus élevé, les aliments du poisson coûtent chers. La covid-19 a également impacté dans mon secteur d’activité », s’attriste cet homme, originaire de la Sanaga Maritime. Malgré la crise sanitaire, Étienne ne compte pas lâcher prise. « Je vais à l’avenir développer grandement mon activité en travaillant avec les grossistes. Pour l’instant je me distrait avec mes poissons », sourit-il.
Amélie Dita