Au Nord-Kivu, une jeune agronome nourrit les villages en guerre
Depuis 2013, Judith Kitambala se consacre à la formation des paysans, principalement des femmes, dans l’exploitation des potagers à l'Est de la République démocratique du Congo.
Elle est connue pour sa courtoisie, son courage, mais surtout pour sa disponibilité à voler au secours des agriculteurs au Nord-Kivu, à l'Est de la République démocratique du Congo. Judith Kitambala, 28 ans, sillonne la localité de Rutshuru, une zone à risque du fait des combats réguliers entre des groupes rebelles et forces gouvernementales, proche des frontières du Rwanda et de l’Ouganda, pour encourager les femmes à pratiquer l’agriculture.
A travers des formations, cette agronome de formation aide les habitants à développer une agriculture de subsistance qui pourra leur permettre de prendre en charge leur famille. « Dans cette partie du pays, la sécurité alimentaire des familles dépend principalement des femmes, c’est pour cette raison qu’elles sont particulièrement ciblées », précise Judith. D’après ses explications, malgré la disponibilité des terres arabes, ces femmes vivant dans une grande précarité ont peu ou pas du tout de connaissances en agriculture. D’où les mauvaises pratiques agricoles et par ricochet les mauvais rendements observés.
Lutter contre la faim
Un déficit informationnel que cette passionnée d’agriculture a décidé de combler. Depuis 2013, Judith Kitambala passe ses journées sous le soleil et la pluie, à inculquer les bonnes pratiques agricoles à ces paysans et à inciter les jeunes, principalement les femmes, à s’investir dans la culture des légumes. L’agronome doit très souvent traverser des zones en guerre. Un danger qui ne décourage pas cette jeune formatrice qui s’est familiarisée avec le monde agropastoral dès son enfance.
« Alors que j’étais encore à l’école primaire, j’ai commencé à aménager mon potager sur un lopin de terre dans mon quartier. C’est dans ce jardin que les riverains s’approvisionnaient en légumes frais », se souvient-elle. Après ses études universitaires, elle décide de partager sa passion et ses connaissances avec les paysans, à travers l’association des Jeunes cultivateurs et éleveurs du Kivu, dont elle est l’une des responsables. « Je me lève à 6 heures du matin pour me rendre dans les plantations où nous montrons aux paysannes comment réaliser et entretenir les potagers et surtout, avoir des revenus. Je prends chaque jour des risques énormes. Mais je ne lâche pas parce que je veux que toutes ces femmes soient préparées à faire une activité qui peut leur procurer des revenus complémentaires », confie-t-elle. Durant ses formations, les étudiants apprennent à cultiver entre autres, les choux, épinards, aubergines, tomates, poivrons.
Malgré les moyens limités de son association à but non lucratif, Judith assure avoir formé des centaines d’agriculteurs et aidé de nombreuses familles à subvenir à leur besoin. « Je parcours près de 30 Km ou plus à moto, sans compter le temps que je passe au niveau des ruelles impraticables, et tout cela pour rencontrer les paysans situés dans les zones rurales. La souveraineté alimentaire est très complexe et demande la participation effective de la femme », croit la formatrice qui dit tirer satisfaction de la réussite agricole et familiale de ses apprenants.
Zanem Nety Zaidi au Nord-Kivu